Gabrielle, Marie Laberge – 2007 – Ed. Pocket, 868 p.
⭐⭐⭐⭐⭐
Note : 5 sur 5.Alors que je vois, face à moi, la mer qui s’agite et le sable qui s’envole, je prends le temps de vous rédiger un article sur Gabrielle, le premier tome de la trilogie Le Goût du bonheur de Marie Laberge. D’origine canadienne, à la fois dramaturge, metteur en scène, comédienne et écrivaine, elle est primée de plusieurs prix principalement canadiens.
A travers Gabrielle, l’écrivaine se lance dans une ambitieuse description de l’évolution du statut de la femme au sein du foyer sur la première moitié du XXème siècle au Canada. En voyageant à travers Québec et Montréal, nous suivons l’évolution de Gabrielle une jeune mère de famille, moderne pour son époque.
Résumé
Gabrielle est une jeune femme épanouie. Mariée à Edward, une union d’amour, elle dispose d’une place importante au sein de son foyer. Car la situation de la femme après la Première Guerre mondiale est un sujet sensible. Accompagnée de ses sœurs Germaine et Georgina, de ses enfants Adélaïde, Fabien, Béatrice et Guillaume, Gabrielle va se battre à sa manière pour l’évolution du statut de la femme dans la société.
Un mariage d’amour
Gabrielle est une jeune femme épatante. Belle, au regard envoûtant, elle n’hésite pas à dire tout haut ce qu’elle pense. Alors qu’elle allait épouser un bon parti, Jules-Albert, un médecin, son cœur tombe sous le charme d’Edward.
A compter de ce jour, Gabrielle choisira l’amour. Un choix non encouragé par sa famille, l’amour ne devant pas venir déjouer les plans d’unions programmées. C’est ici que Gabrielle nous est présentée comme une femme différente. Elle est liée à son mari par un amour inconditionnel et par un désir sexuel fort qui les unit.
Edward est fier de sa femme et va l’encourager à prendre un rôle plus important dans le foyer. Il ne cherchera pas à freiner ses révoltes, et c’est ainsi qu’elle ne sera pas qu’une simple mère de famille, ni femme de maison. Intégrée dans les échanges politiques de son mari, où elle expose ses visions modernes, Gabrielle sera libre et se battra pour assurer les mêmes libertés et de meilleurs droits à ses enfants.
L’évolution des sufragettes
Alors que sa nièce Rose se rapproche de Paulette, partisane des suffragettes, ce mouvement va prendre de la place dans la vie de Gabrielle. A cette époque où le droit de vote pour les femmes n’est pas autorisé, où celles-ci ne peuvent détenir leur propre compte bancaire ni signer d’acte sans l’accord de leurs maris, les sufragettes vont se battre pour les droits des femmes.
Gabrielle, d’abord réticente par ce mouvement qu’elle juge un peu sévère, finit par se rallier à leur cause. Sous la fierté de son mari, elle va se battre pour les droits individuels de la femme au Canada. Ce n’est que le début de sa bataille.
Gabrielle croit à la nécessité de faire le bien. Catholique, mariée à un protestant, elle se tourne vers son prochain et construit un Centre d’aide. La crise des années 1930 touche très durement le Canada, la pauvreté s’étend, les enfants errent dans les rues à la recherche d’argent et de nourriture. A l’aide de ce Centre, qu’elle dirige sans contrôle direct d’hommes, elle va offrir son aide aux plus nécessiteux.
Une femme admirée et jalousée
Gabrielle est une femme admirée par les hommes. D’abord par Armand, le frère de Paulette, qui pensera pouvoir lui faire ouvertement des avances sans conséquences. Outrée, inquiète pour sa réputation, elle n’hésitera pas à rejeter cet homme aux vertus douteuses.
Surtout, Gabrielle demeurera sans jamais s’en rendre compte (Ô naïveté !) le grand amour caché de Nic. Cet homme, recueilli enfant par la famille d’Edward, est comme un frère pour lui. Obsédé par cette femme splendide, vertueuse, généreuse et moderne, il ne saura se défaire de cet amour impossible qui le brisera toute sa vie.
Gabrielle est également l’objet de jalousies nombreuses, tant par ses sœurs que par son amie Paulette. Pour Germaine et Georgina, depuis l’union d’amour de leur sœur avec un protestant, les critiques pleuvent. Face à une Germaine vieille fille, et à une Georgina bien malheureuse en ménage, elle gardera la tête haute et ne se retiendra pas d’exprimer à haute voix ce qu’elle pense tout bas.
Les chiens ne font pas des chats…
Alors que Gabrielle représente sans aucun doute le personnage principal ainsi que le personnage le plus intéressant de l’histoire, nous sommes troublés par le destin d’Adélaïde, l’aînée de Gabrielle et Edward. Dotée d’un fort caractère, elle attire notre attention.
Cette jeune fille, qui au début de l’histoire n’est qu’une enfant, est incommensurablement liée à son ami Florent. Fourrés ensemble depuis la naissance du jeune garçon, Adélaïde joue comme un rôle de nourrice pour l’enfant. Elle le connaît par cœur, est la seule à se douter de l’endroit où il se cache lorsqu’il disparaît, et est obsédée par son bonheur.
La force de caractère d’Adélaïde provient également du fait qu’elle est le portrait craché de sa mère, tant physiquement que mentalement. Déjà enfant, elle ne se retient pas de dire ce qu’elle pense. Grande fierté de son père, elle se joindra à sa façon dans la bataille de sa mère. Ce personnage passionnant sera à l’honneur dans le second tome de la trilogie, Adélaïde.
Mon avis sur l’œuvre
Je ne connaissais pas Marie Laberge. Cette écrivaine a pourtant rédigé de nombreuses œuvres, mais aucune n’avait attiré mon attention. Gabrielle est donc le premier ouvrage que je lis de cette écrivaine, et c’est sans aucun doute un énorme coup de cœur.
Plongés dans le Canada en pleine crise des années 30, nous apprenons beaucoup de choses au sujet des conséquences économiques de cette période de crise. La pauvreté se met à pleuvoir dans les rues, les individus sont affamés, les enfants essaient tant bien que mal de trouver de quoi survivre.
Parallèlement à ce phénomène économique, un phénomène politique fait également son apparition. Les suffragettes, qui se battent pour introduire la femme dans la société, pour lui conférer des droits fait son apparition. Un mouvement qui permettra à celles-ci, en 1940, d’obtenir le droit de vote.
Les personnages de l’histoire sont tous plus ou moins passionnants. Nous suivons le parcours de cette famille sur plusieurs années, les épreuves qu’ils rencontrent, les solutions qu’ils y trouvent. C’est un parcours à travers une vie de famille, face à des membres auxquels nous nous attachons. Le deuxième tome promet d’être très intéressant.
Conclusion
J’ai adoré la lecture de Gabrielle. Cette histoire nous transporte à travers les problèmes sociaux-économiques et politiques du Canada pendant la crise des années 30.
C’est une saga familiale très intéressante, simple, bien écrite, qui nous fait voyager et qui nous émeut. Je le conseille vivement, car malgré ses presque 870 pages, l’histoire ne s’est pas essoufflée un instant. Je suis impatiente de découvrir le tome 2 !