Dzud, Romain Jaillant – 2020 – Ed. de la Rémanence, 191 p.
20-39 Pour débuter cet article, je remercie d’abord chaleureusement Romain Jaillant de m’avoir envoyé son roman. Un titre dont je n’avais pas du tout entendu parler, une maison d’édition que je n’avais jamais remarquée dans les rayons des librairies. Pourtant, cette découverte fut une vraie réussite ! Romain Jaillant est ophtalmologiste. Après avoir rédigé un premier livre consacré à sa discipline (notamment à son histoire), il nous propose son premier roman Dzud. A travers le voyage d’un jeune garçon, dans un monde futuriste, nous sommes menés à nous interroger sur les problèmes sociétaux d’aujourd’hui : l’environnement, la consommation, et le fonctionnement de notre société. Et si demain, le monde dans lequel nous vivons disparaissait ? C’est la conséquence du Dzud, ces « hivers maudits » rasant, par le froid, tout sur leur passage. Dans ce nouveau monde, notre civilisation actuelle a disparu : les richesses, les livres, les technologies… Il ne reste que trois populations de paysans. Dans ce monde, la nature a repris le dessus. Youri, chef de la tribu des Bögols, jeune père de famille, observe la famine de son peuple et décide de partir chercher de quoi les nourrir. Alors que son nourrisson n’a plus de quoi se nourrir, et que sa survie devient incertaine, Youri décide de quitter son camp pour trouver à manger. Pour cela, il décide de parcourir les steppes et de retrouver sa sœur. Ils ne se sont pas vus depuis bien longtemps. Mais le froid n’a pas fait des ravages que dans son propre camp. Celui de sa sœur est dévasté, les hommes se sont entre-tués. Il ne demeure plus rien, que des corps sans vies, adultes et enfants. Youri continue son chemin, inquiet de chaque lendemain. S’il ne trouve pas de solution, ils mourront tous. Et puis, par hasard, il retrouve Sergueï, un ancien ami. Cet homme se souvient du grand Dzud qui a dévasté la tribu. Youri le comprend, le meilleur moyen de sauver ses hommes est de ramener Sergueï avec lui. Ni une, ni deux, ils s’attèlent et rentrent au camp. Les années passent, la tribu a survécu au froid, et Oleg, le fils de Youri, grandit. Lors de son retour au camp, Sergueï avait ramené un objet qui lui était très précieux. Un livre. Cet objet inconnu, indéchiffrable, représente le souvenir d’une civilisation perdue. Lorsque Sergueï meurt, la coutume veut que le mort soit entouré de son objet le plus précieux. Un moyen pour les vivants de se débarrasser de ce livre, objet qui effraie depuis son arrivée. Mais Sergueï a de plus grandes ambitions pour Oleg. Avant sa mort, il l’encourage à poursuivre une mission : récupérer le livre et retrouver le chaman installé dans les montagnes qui l’aidera à le déchiffrer. Ici commence l’aventure d’Oleg, où il découvrira la civilisation ingrate qui possédait tout et ne s’en satisfaisait jamais (c’est-à-dire nous…). Les Editions de la Rémanence ont été fondées en 2014. Une jeune maison d’édition, donc, qui se décrit sur son site internet de la façon suivante : La Rémanence est une maison d’édition créée en janvier 2014, avec beaucoup de passion et un petit brin de folie, faisant fi de notre contexte de surproduction littéraire ; parce que les livres qui nous ont marqués ne nous quittent jamais et parce que la littérature, tel le poids des années, confronte, façonne et enrichit, celui qui écrit, celui qui lit. Site internet des Editions de la Rémanence C’est avec plaisir que je découvre à la fois un nouvel auteur, et une nouvelle maison d’édition. A réception, le livre est un bel objet. Une écriture agréable à lire, ni trop petite ni trop grande, un livre aéré, un grain de page doux. Que du positif. L’histoire écrite par Romain Jaillant n’est pas vide de sous-entendus. Si demain notre monde était rasé, que toutes les technologies actuelles disparaissaient, et que la terre reprenait ses droits sur la planète, que se passerait-il ? C’est cette réflexion que nous propose l’écrivain. Une civilisation revenue à ses droits les plus spartiates. Oleg découvre, à travers les livres, le monde que nous avons aujourd’hui (la possibilité de communiquer à l’autre bout du monde en quelques secondes, des richesses inépuisables, une vie plus longue et en meilleure santé, les transports…). Ce monde ingrat qui a laissé ses actes et technologies entrainer la colère de la nature. La comparaison de ces deux mondes très différents nous pousse à nous interroger. Nous suivons habituellement dans les romans le cheminement classique de l’innovation, de la croissance. Mais nous faisons face ici à un phénomène de décroissance quasi-totale, avec une disparition des ressources élémentaires. Et le message est simple : si nous poursuivons dans cette voie, et que la nature continue de se déchaîner, n’est-ce pas l’avenir que nous offrirons pour les générations à venir ? A travers ce roman, nous sommes un peu bousculés par ces théories évidentes. Mais ce qui m’a beaucoup touchée, c’est le sentiment de honte. Lorsque je me suis imprégnée de cette histoire, que je me suis attachée au personnage, j’ai ressenti la honte. La honte de me dire qu’en effet, peut-être que dans des centaines de milliers d’années, ce que nous avons construit aura disparu, aura été détruit par la colère de l’environnement qui se déchaîne. Et j’ai imaginé la découverte de cette nouvelle civilisation, qui ne possède rien et qui découvre le gaspillage que nous avons fait de notre planète. Et de ça, j’en ai honte. Alors merci, Romain Jaillant, de m’avoir un peu secouée. Sensibilisée par ces sujets comme beaucoup d’entre nous, je souhaite juste accentuer mes efforts à mon niveau pour m’assurer que le Dzud ne se développera pas sur notre planète 😉. Cette découverte a réellement été un coup de cœur. Un sujet prenant, qui nous encourage à nous poser des questions sur notre impact environnemental. Un premier roman réussi, très bien écrit, qui nous fait parcourir l’aventure d’une civilisation démunie. Les conséquences de notre mépris et de notre désengagement. Un livre très intéressant que je recommande.
Résumé
Tout pour sauver sa tribu
Oleg découvre les livres
Mon avis sur l’œuvre
Les Editions de la Rémanence
Le roman
Conclusion